En réponse au boom médiatique qu’ont provoqué les propositions finlandaises d’expérimentation du revenu de base, le MFRB organisait le 3 mars dernier une conférence à l’Ambassade de Finlande. L’objectif ? Comprendre les propositions et motivations finlandaises sur le sujet et évoquer les expérimentations envisagées en France.

La conférence s’est organisée autour de quatre intervenants et un débat sur le revenu de base et ses expérimentations. Parmi eux, Olli Kangas, directeur du département de recherche de KELA (Institut finlandais de protection sociale), Martine Alcorta, conseillère régionale Aquitaine Limousin Poitou-Charentes déléguée à l’innovation sociale et sociétale, qui a pour ambition d’expérimenter un revenu de base dans sa région, Arnauld de l’Epine d’Ars Industrialis, association internationale pour une politique industrielle des technologies de l’esprit (fondée notamment par Bernard Stiegler) qui s’est prononcée en faveur d’un revenu contributif et Jean-Eric Hyafil, co-fondateur du MFRB – Mouvement Français pour un Revenu de Base. Cet article résume les débats et comporte quelques tweets échangés pendant la conférence avec le hashtag #RDBFinlande.

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En Finlande, les expérimentations débuteront en 2017

La Finlande est actuellement dans un processus de définition et d’étude de faisabilité d’une expérimentation d’un revenu de base. Afin de faire face à la complexité de la protection sociale et aux risques des trappes à pauvreté, le débat sur la mise en place d’un revenu universel a émergé et s’est concrétisé ces dernières années. Aujourd’hui, une phase de réflexion sur la possibilité de l’expérimenter est en cours. Plus précisément, un rapport intermédiaire proposant quatre types d’expérimentations sera soumis au gouvernement à la fin du mois de mars. Ce dernier devra alors choisir l’une des trois propositions afin qu’elle soit approfondie dans un rapport final pour le 15 novembre prochain. L’objectif est de commencer l’expérimentation au début de l’année 2017 pour une durée de deux ans. 

Parmi ces trois propositions, la première propose un revenu de base distribué à tous et sans contrepartie. Pour la seconde, il s’agit d’une forme de RSA inconditionnel, remplaçant les minima sociaux actuels. La troisième option envisage le financement d’un revenu de base sous la forme d’un impôt négatif. Cependant, la question du montant, du nombre de personnes participantes et de l’inconditionnalité du revenu reste encore en débat. Des problèmes annexes viennent aussi se greffer, notamment la crainte de contentieux constitutionnels ou au critère de résidence. L’instauration du revenu de base nécessite en effet une refonte totale du système de protection sociale, ce qui génère des tensions, notamment avec les syndicats, acteurs majeurs du système actuel.

La France, prochain pays européen à lancer des expérimentations ?

Citant Amartya Sen, qui souhaitait que chacun développe ses propres capacités sans se voir imposer un travail, Arnauld de l’Epine a insisté sur l’importance à la liberté de choix, en conformité avec la déclaration de Philadelphie ou la Charte de l’Union Européenne, qui mentionne que « toute personne a droit à la liberté du choix et de l’exercice d’une profession, selon les dispositions régissant chaque profession ». Prenant appui sur le rapport du Conseil National du Numérique, présenté en janvier, qui propose expérimenter et d’approfondir le projet de revenu de base en France, Arnauld de l’Epine a donc soutenu l’idée de mettre en place un revenu garanti pour faire face à l’automatisation des processus de production et à la hausse du chômage et de la précarisation. Ars Industrialis travaille ainsi en collaboration avec Plaine Commune, communauté d’agglomérations de Seine-Saint-Denis, afin d’expérimenter un revenu contributif ciblé vers les jeunes.

Jean-Eric Hyafil a ensuite rappelé le caractère transpartisan du MFRB. Dans sa charte, le MFRB promeut un revenu de base inconditionnel, individuel, sans détériorer la situation des plus modestes ni remettre en cause le chômage, les retraites ni l’assurance maladie. Ainsi, l’une des propositions du MFRB serait de mettre en place un revenu de base à l’échelle nationale en plusieurs étapes. Tout d’abord, cela pourrait passer par la mise en place d’un RSA enfant ; puis par l’automatisation, l’individualisation et enfin l’universalisation du RSA.

Tous les intervenants se sont accordés sur la nécessité d’expérimenter le revenu de base avant de le généraliser, à l’exemple des processus en cours en Finlande et aux Pays-Bas. Ainsi, en France, le projet d’expérimentation en Aquitaine est encore à l’état embryonnaire. Mais l’accord obtenu par le groupe EELV et le Parti Socialiste lors des régionales prévoit le financement d’une étude de faisabilité. Martine Alcorta entend donc étudier le sujet afin de proposer une expérimentation. Cependant, les paramètres ne sont pas encore fixés. Évoquant la fin de l’image d’assistanat dont pâtissent les bénéficiaires et citant Amartya Sen (« la richesse est de pouvoir choisir sa vie »), Martine Alcorta nous a montré sa volonté de mener à son terme ce dispositif d’expérimentation.

La France pourrait donc s’inspirer des propositions finlandaises pour mettre en place sa propre expérimentation en vue de l’adapter à notre contexte national. Évoquer le sujet, soumettre des idées et témoigner des différentes propositions… Cette conférence a permis de mettre en exergue le débat grandissant sur le revenu de base. Le MFRB se tient à disposition de toutes les collectivités souhaitant réfléchir à cette grande idée du XXIe siècle.

Pour retrouver l’ensemble des tweets de la conférence : #RDBFinlande.
Pour visionner la captation de la conférence : voir sur notre chaîne Youtube.


Photo : MFRB – Licence CC.